L’art dit colon / Albin Michel
Par Alain Weill, auteur d’ouvrages de référence, diplômé de l’EHESS en sociologie et sémiologie des arts et littératures, fondateur et directeur du Musée de l’affiche. Il dirige depuis 1989, le Festival international des arts graphiques à Chaumont. Alain Weill s’intéresse à l’art colon depuis les années 1970 et a constitué l’une des plus importantes collections au monde, présentée lors de l’exposition « Homme noir, homme blanc » au Musée du Quai Branly, en 2017, dont il a dirigé le catalogue qui a reçu le prix international du Livre d’art tribal et le Prix du Livre d’art primitif. Dans « L’art dit colon », il écrit : « Cet ouvrage ne se veut pas une confrontation entre les chefs-d’œuvre de l’art dit « primitif » ou « premier » et l’art dit « colon ». Ce n’est pas notre propos. Tous appartiennent à ce qu’il me paraît logique d’appeler l’art africain. Confronté à la colonisation, il n’a rien perdu de son génie créatif. Il serait temps de le reconnaître » Oui, en effet, plus on parcourt ce splendide ouvrage, plus on en prend conscience. Pourtant au début des années 70, ces objets considérés au mieux comme des objets de « curiosité », au pire comme des « objets d’aéroport », n’intéressaient quasiment personne. Heureusement l’art africain a simplement et naturellement évolué au fil des années. Que voit-on ? Des militaires, des missionnaires, des fantassins indigènes, des tirailleurs sénégalais, des cavaliers, des colons, des commerçants arabes, des bagnards. Ils sont sculptés en haut de canne, en masques, en statuettes, en pipe, en cuillère, en sièges, des cyclistes, des avions, etc., avec un humour évident en jouant sur les disproportions, et un sens de l’observation enfantin, au sens pur du terme. « En versant un même sang, vous gagnerez les mêmes droits » avait-on dit aux africains, comme ce colon fumant dans sa chaise à porteur, ou ce cavalier britannique mal assorti à sa monture. C’est sûr, il y avait de quoi rire. Le sculpteur africain a réagi par la caricature. Il est aussi témoin de son temps, traduit la vie tribale, le vaudou, les êtres mythiques, les rites, le quotidien (plusieurs sur une mobylette, cyclistes, avions, couturières sur machine à coudre Singer, joyeuses scènes de bordel, agent indigène escortant une jeune captive… ) Une occasion unique de découvrir que l’art africain est bien vivant. Relié. Format : 22 x 29 cm. 224 p. 39€. Paule Martigny