Musée des Beaux-Arts de Lyon, Jacqueline Delubac, le choix de la Modernité...
« Rodin, Lam, Picasso, Bacon ». A propos d'Auguste Rodin, une polémique est née dans le milieu artistique à l'occasion de cette exposition. Ses aquarelles érotiques seraient des faux ? Pourquoi alors exposer des faux ? Jacqueline Delubac (1907-1997) avait certainement « bon oeil », comme elle le déclarait, elle-même, mais néanmoins, elle acheta des copies. Ainsi, personne ne serait infaillible ? Je suis rassuré, et vous aussi. Jacqueline Delubac, née à Lyon dans le 6e arrondissement, n'est restée l'épouse de Sacha Guitry que 5 ans, un bail pour ces deux séducteurs. Ils se séparèrent en 1939. La carrière de Jacqueline Delubac ne fut pas interrompue par la Seconde Guerre Mondiale, ce qui lui fut reproché à la Libération. Au milieu des années cinquante, elle commença la constitution de sa collection, en achetant des œuvres de Hans Hartung (alors, une des figures de proue de l'Abstraction,) et de Jean Fautrier (unanimement reconnu et célébré par la critique d'art, dont Michel Ragon, dans la revue Arts). Rien d'une visionnaire, mais une collectionneuse courageuse, comme on voudrait en voir beaucoup dans les nouvelles générations. Elle acquit aussi des toiles de Jean Dubuffet, Georges Braque au crépuscule de sa vie, de Francis Bacon, etc. Elle posa même, pour l'admirable Bernard Buffet, tellement injustement honni. Jacqueline Delubac portait-elle la poisse ? Myran Eknayan, collectionneur d'Art moderne (Manet, Bonnard, Degas, Vuillard, etc), mourut en 1985, quatre ans après leur union. Pour d'autres, elle fut un porte-bonheur. Jacqueline Delubac fit don de sa collection au Musée des Beaux-Arts de Lyon, après une prudente rencontre avec Philippe Durey, alors en charge de l'institution. Le Musée était encore en chantier. Ce don venait à l'instant propice compléter le fonds du Musée qui avait heureusement reçu la dation Picasso. En 1995, pour la célébration de l'achèvement des travaux, Jacqueline Delubac constatait que ses volontés étaient respectées. On voyait même, les horribles œuvres de Paolo Valorz qui témoignent de la fragilité du goût de Jacqueline Delubac. Beaucoup sont choqués par l'utilisation de tapisseries à lourds motifs colorés, sur lesquelles, on a posé les tableaux. Il y a là un incontestable enfermement de l'accrochage, dans une idée bourgeoise de l'Art et de ses collectionneurs. La grande foule lyonnaise des jours heureux s'était déplacée pour cet événement « mondain ». N'était-il pas question d'une comédienne célèbre, et surtout d'un immense dramaturge, et collectionneur d'art, Sacha Guitry. Quel comédien, dans la lignée de son père, Lucien Guitry ! Comme, il aurait ri, « Sacha », puisque c'était ainsi que ses amis le nommaient, de voir ces Lyonnais et Lyonnaises du XXIe siècle pérorer devant ses choix artistiques, et ses films présentés au cœur de l'exposition, ce qui est un phénomène de mode hérité de Paris, où il est pratiqué dans tous les Palais Nationaux. Oui, comme il aurait pouffé de voir ces apparatchiks socialo-communistes, comme Patrick Béghain, ex-adjoint à la Culture, comme Jacques Rey, ex-conseiller municipal communiste, se prosterner devant l'image de celui que leurs modèles, probables résistants de la dernière heure, avaient brutalement arrêté, avec sa dernière épouse, Lana Marconi, le 23 août 1944. Sacha fut emprisonné pendant 60 jours, à Drancy, où il échappa à la mort, comme il le confia, lorsqu'il retrouva sa liberté. A Lyon, le 25 mai1948, rebelote, Sacha est arrêté à Lyon, après la diffusion de son film Le Comédien, cinq illuminés l'obligèrent à se recueillir devant le monument aux morts, de la place Bellecour. En 1947, Sacha avait pourtant obtenu un non-lieu. Mais, il n'oublia jamais ces indignes humiliations. Il est mort dix ans plus tard, le 24 juillet 1957, la même année que le président Edouard Herriot. Quelle revanche, cette exposition pour un homme qui fut menacé de l'indignité nationale !... Pendant cette improbable inauguration, on voyait aussi : Jean-Claude Guillaumon, Thierry Raspail, Christian et Yolande Gelpi, Michèle Caussin-Bellon, Emélie Adilon, Monique Ruch, Sylvie Burgat, Agnès Gachet-Mauroz, Michel Chomarat, Déméter, Bernard et Alice Chardère, etc. Toutes les facettes de l'univers des arts à Lyon. Oui, la vie est une comédie, aurait dit Sacha Guitry, en balançant avec élégance ses bras dans l'atmosphère, la tête protégée par son admirable chapeau. Oui, quelle drôle de comédie ! Jusqu'au 16 février 2015. 20, place des Terreaux-Lyon 1er. De 10 à 18h. Vendredi de 10h30 à 18h. Fermé le mardi, et jours fériés.