Musée des Beaux-Arts de Lyon, Sylvie Ramond, et Patrice Béghain conjurent un long maléfice...

Mercredi, 16 Décembre, 2015 - 08:56

Plus jamais, les Arts à Lyon ne seront exclus des manifestations officielles...

Oui, les Arts à Lyon (titre de la revue du critique d'art, Marius Mermillon) sont enfin honorés, comme ils le méritaient, et, pour ce qu'ils sont : le fruit de la création de la seconde école artistique française, après Paris, surtout pour la peinture. Après la Seconde Guerre Mondiale, l'année 1958, plongea la vie artistique lyonnaise, dans les ténèbres de l'exclusion muséale. A part, René Deroudille (et, parce qu'il était le correspondant de la revue « Arts » de Raymond Cognat, et membre de la corporation des pharmaciens), il n'y avait plus de figures tutélaires. Henri Béraud, l'écrivain, le Prix Goncourt, l'homme qui identifia la Modernité dans l'école de Lyon, Marius Mermillon qui avait su la défendre en soutenant le groupe Ziniar, sans omettre de regarder du côté d'Olivier de Cocquerel, et de l'autre, des futurs Sanzistes, et enfin, Marcel Michaud, galeriste exceptionnel, qui avait reconnu le visionnaire chez le poète, et compagnon d'architecture de Tony Garnier, Louis Thomas, tous trois étaient morts, et leur absence plongea l'aventure des Arts plastiques à Lyon, dans un long silence. Un combat débuta pour lutter contre un ostracisme certain de la part des pouvoirs en place. René Deroudille obtint quelques succès, soutenu par Jean-Jacques Lerrant, Henri Leroudier, André Mure, et, Régis Neyret, mais, malgré tous ces efforts, les artistes lyonnais de toutes les époques étaient encore cantonnés à des valeurs provinciales. Un mauvais sort planait, et engourdissait les meilleurs volontés. J'ai personnellement, succédant à René Deroudille, au journal Le Tout Lyon, puis, comme rédacteur de la revue Mémoire des Arts reçu, en reprenant l'étendard de mes aînés, plus de déshonneur que de reconnaissance. Non, je n'invoquerais pas la célèbre chanson de Guy Béart... Il fallut attendre, la rencontre de Sylvie Ramond, conservateur en chef du patrimoine et directeur du musée des Beaux-Arts de Lyon avec Patrice Béghain qui fut directeur des Affaires culturelles, puis, adjoint à la Culture du sénateur-maire, Gérard Collomb, pour aboutir à la consécration des efforts de nos prédécesseurs, des nôtres, et de ceux de collectionneurs avisés et déterminés, comme Paul Dini, et Michel Bosse-Platière. Je reconnais devoir beaucoup de mes connaissances à Michel Bosse-Platière. Il m'a généreusement appris à lire dans les interstices. Quel bonheur de voir cette exposition débuter avec une haute composition du peintre Jean Couty. le plus prolifique et le plus inspiré des peintres du XXe lyonnais avec Antoine Chartres, Pierre Combet-Descombes, Jacques Truphémus, Jean Fusaro, et André Cottavoz. Plus loin, rayonne l'envoûtant « Désespoir » du peintre et graveur, Marcel Roux (1878-1922), objet d'une étude sérieuse de Colette Bidon. Soulignons que cet événement fut préparé dans la confraternité, sans aucune volonté d'exclusion, ce qui représente un notoire changement. Sortirions-nous de l'esprit des clans et des chapelles ?... Il eut fallu une vaste composition de Tony Tollet pour incarner l'Ecole des Beaux-Arts à son sommet et les Salons, et, une lumineuse Vue de Lyon par le sensible aquarelliste Eugène Villon. Ceux qui connaissent Alexandre Bonnardel, comme le peintre des pêches délicates, seront surpris devant « les Exilés » une grande toile, de 1916. Une peinture rare, la composition de Léonie Humbert-Vignot (1878-1960) intitulée : « Un Jour de grève », de 1910. Les pastels d'Adrien Bas, acteur fondamental du groupe Ziniar avec Georges Albert Tresch, et Etienne Morillon, proviennent de la collection de Renaud Icard. Ils furent peu vus. Adrien Bas en composa des milliers, beaucoup des signatures sont apocryphes. J'ai regretté l'absence de Jean-Albert Carlotti, fondateur du groupe des Nouveaux, avec Marc Aynard, petit-fils du banquier, député, et président de la Chambre de Commerce, Edouard Aynard. Dommage que le sculpteur, Genevière Bohmer, qui fut élève de l'école des Beaux-Arts de Lyon ne soit pas dans l'exposition, tout comme, Marie-Thérèse Bourrat, une des artistes les plus passionnantes, vivant à Lyon. Une possibilité manquée de rendre hommage aux femmes artistes. Je veux revenir sur la présence de René-Maria Burlet (1907-1994), membre du groupe Témoignage de Lyon, et de son œuvre intitulée : « Portrait posthume du groupe Témoignage » de 1950. Louis Thomas (1892-1989) est au sommet d'un arbre symbolique, comme l'initiateur d'un mouvement nourri de Surréalisme et de Spiritualité. On voit aussi Albert Le Normand, et son indéfectible ami, Claude Idoux qui découvrirent l'esprit et la manière de Témoignage en 1941, À Vienne, chez Jean Chevalier, pour la dernière exposition du groupe perturbée par la guerre. On reconnaît aussi, Jean Bertholle qui fut avec le sculpteur, Etienne-Martin membre de l'Institut de France sur la recommandation de l'architecte, Bernard Zehrfuss, concepteur du musée gallo-romain de Fourvière. Albert Le Normand qui mérite d'être étudié, et apprécié à la lumière des longs et multiples séjours qu'il fit en Inde. Parmi les plus jeunes, saluons la présence de Stéphane Braconnier (1958-2015) qui vient de nous quitter. Nous étions heureux de retrouver l'âme de Pierre Jacquemon (1935-2001), Jim Leon (1938-2002), Henri Lachieze-Rey (1927-1974), Jean Martin (1911-1996), et la première version de « Les Aveugles » de 1937, Paul Philibert-Charrin (1920-2007), Jean Raine (1927-1986), Charles Giaume (1925-1994), etc. Saluons encore la forte présence de Pierre Pelloux (1903-1975), et de Camille Niogret qui dissimulait soigneusement les œuvres exposées, pendant les longues années, où je l'ai fréquenté, à la Croix-Rousse, mais surtout, dans son atelier de Treffort, dans le Revermont. Il expérimentait de nouveaux horizons, par lesquels, il nous fit souvent accéder au sublime. Beaucoup ont attendu jusqu'à leurs derniers instants, cette reconnaissance muséale. Ils sont exaucés. Alléluia !... Nous devons remercier Sylvie Ramond, et Patrice Béghain pour leur lucidité. Quelle meilleure manière de les remercier que de les soutenir en visitant cet incontestable événement? Il doit devenir le centre de retrouvailles de toutes les familles lyonnaises.  « Un regard sur la scène artistique lyonnaise au XXe siècle », jusqu'au 10 juillet 2016. Musée des Beaux-Arts de Lyon-20 place des Terreaux-Lyon 1er. 04 72 10 41 15 ou www.mba-lyon.fr