Rétrospective de Jean-Paul Schmitt au château de Lacroix-Laval…
La rétrospective est définitivement un exercice périlleux qui flatte l’égo de l’artiste tout en lui faisant prendre tous les risques, surtout, lorsqu’il fait confiance à autrui, pour sélectionner les œuvres présentées. J’ai connu Jean-Paul Schmitt lorsqu’il s’engagea dans la voie de la comédie avec la troupe de Roland Chalosse, sur les pentes de la Croix-Rousse dans la rue René Leynaud, où figurait Françoise Riga, déjà compagne du talentueux Pierre Bianco. Nous étions encore dans les années soixante-dix. On déjeunait dans le temple de la « crique lyonnaise », le fabuleux Persil Bémol. Que de souvenirs ! Et aussi, celui du resto d’à côté, animé par la « Mère Gache », archétype de la Mère lyonnaise, matrone de bouchon, où, on voyait surgir le soir la fantomatique silhouette de Robert Bordenave, acteur de la troupe débutante du théâtre de la Comédie de Roger Planchon. Le temps a jeté un voile sur les regrets, et les ressentiments de Robert Bordenave qui allumait des soirées un peu vineuses. Oui, le temps est passé. Jean-Paul Schmitt a réussi sa vie professionnelle. Puis, il y a quelques années, il a commencé à s’investir sérieusement, dans la peinture, où, il obtient des résultats très intéressants. Je me souviens particulièrement de sa série évoquant son grenier, et de l’apparition d’un univers mélancolique traduit par de larges présences de la matière. Certains voient, avec justesse, des liens avec l’œuvre d’Adrien Bas, membre du groupe Ziniar, et fondateur du Salon du Sud-Est. Je crois que ce constat est assez vrai, sauf qu’Adrien Bas ne pouvait plus peindre sur toile, depuis qu’il était attaqué par la tuberculose osseuse. Jean-Paul Schmitt, au contraire, réussi ce qu’il fait de mieux dans les grands formats. Ils ne l’arrêtent pas, et plus encore, depuis qu’il peint dans son nouvel atelier de Saint-Martin-en-Haut, dont il décrit avec force les paysages somptueux : Saint-Martin vers le Terron, les nénuphars à Saint-Martin, les brumes, Saint-Martin à Rochefort, etc. Nous ne sommes pas très loin d’une Nature qui vit naître une splendide personnalité des arts à Lyon, Etienne Morillon. Je crois que Jean-Paul Schmitt a encore beaucoup de choses à nous dire avec la peinture, à quelques conditions : qu’il soit plus rigoureux, et qu’il renonce à certaines « exhibitions », comme on dit dans l’univers People. Je crois qu’à ce prix-la, celui d’une contention indispensable, il peut nous apporter un niveau d’émotion supérieur à ce qu’il produit actuellement. Jean-Paul Schmitt détient dans le fond de son âme, suffisamment d’abnégation pour atteindre cet objectif idéal. Jean-Paul Schmitt-Domaine de Lacroix-Laval jusqu’au 20 juin 2016