Le diable parle toutes les langues / Albin Michel
Roman de Jennifer Richard, franco-américaine d’origine guadeloupéenne. Elle a publié aux éditions Albin Michel, « Il est à toi ce beau pays », unanimement encensé par la critique. « Le Diable parle toutes les langues » est un roman inspiré de la vie de « Sir Basil Zaharoff, (1849-1936) le plus grand marchand de mort des temps modernes » dixit Romain Gary. La citation choisie en exergue d’Anatole France : « On croit mourir pour la patrie; on meurt pour des industriels.» est on ne peut mieux choisie. Basil Zaharoff, d’origine grecque est né dans un quartier pauvre de Constantinople. Dès son plus jeune âge il s’illustra maître dans l’art des combines. A Londres, il débuta comme courtier pour des marchands de mitrailleuses et canons : « Un courtier est un intermédiaire qui vend un produit qui ne lui appartient pas à un autre intermédiaire qui achète le produit avec de l’argent qui ne lui appartient pas ». Vendre des armes s’avéra immédiatement lucratif. A 26 ans il s’investit à fond profitant de tous les conflits, armant les uns contre les autres, un marché inépuisable, avec son point culminant : la guerre de 14-18. Sans état d’âme, après tout il ne faisait que vendre des armes, il ne s’en servait pas ! Basil Zaharoff devint un grand magnat de la presse, de la finance et du pétrole, lavant son âme (si tant est qu’il en ait eu une) par de larges opérations philanthropiques. Mécénat qui lui vaudra une ribambelle de médailles. Seule la quête de la fructification lui importait. Elle agira comme une drogue jusqu’à la perte de sa femme dont il ne se remit pas. Il passa les dix dernières années de sa vie retiré des affaires. Jennifer Richard construit son roman autour des derniers moments de sa vie, lorsque diminué, taraudé par des nuits d’insomnies, il s’interroge sur son rôle sur terre. Il confie alors la lecture de son journal à sa fille préférée, Adèle. Elle lui est dévouée bien qu’étant son exact contraire. La lecture de ses notes intimes remontent le cours de sa vie. Nous recommandons la lecture de la lettre de l’Irlandaise. C’est un des plus beaux passages de ce roman sur l’ironie de la guerre. De son château de Balincourt à ses hôtels de luxe de Monaco, des conflits aux répressions des grèves, Gallipoli, Cuba, la Namibie, les Balkans, etc, suivez l’ami et le complice de tous les chefs d’Etat, Basil Zaharoff, symbole glaçant d’une éminence grise sans éthique. Oui, Basil Zaharoff, qu’as-tu fait de ta vie ? Remarquablement écrit avec beaucoup de pertinence et de subtilité. Broché. Format : 15 x 22 cm. 432 p. 21,90€. Paule Martigny