Adieu Birkenau / Albin Michel
Que lisait-on au fronton de l'entrée du camp pour accueillir les déportés ? Arbeit macht frei. Quelle ironie ! Le travail rend libre. Ah oui, de crever….
Tout l'album est issu des paroles de Ginette enregistrées par le scénariste de bandes dessinées JDMorvan & Victor Matet, journaliste de France Info : "C'était un moment d'exception, conclu par cette phrase, alors que nous nous trouvions devant les ruines de la chambre à gaz : "ce sera mon dernier voyage à Birkenau". Voilà pourquoi ce livre s'appelle Adieu Birkenau.
Le dessinateur Cesc F. Dalmases écrit : "L'odyssée de Ginette est un exemple du mal que l'être humain peut provoquer. Cependant, sa vie et sa survie sont la lumière qui devrait nous permettre de voir et comprendre. L'oubli est le plus grand des dangers. Lire, et se souvenir nous sauveront." Cette bande dessinée y contribue, se faisant passeur auprès des nouvelles générations. L'équipe qui a contribué à sa création l'a fait de tout son cœur, intensément, avec émotion. Puissions-nous agir en conséquence et croire avec Roger qui a effectué la mise en couleurs : "J'espère que ce livre nous aidera à ne plus jamais répéter les mêmes erreurs." Tentons de ne pas subir le supplice de l'espérance !
Sur la première planche le petit Richard Kolinka (batteur du groupe Téléphone) regarde la manche retroussée de sa mère : "Quand j'étais enfant, je pensais que toutes les mamans avaient un numéro sur le bras". Le compte à rebours est amorcé. Voici l'explication du tatouage et l'histoire de Ginette dont le nom de jeune fille est Cherkasky. Née le 4 février 1925, elle avait 19 ans au moment de sa déportation à Auschwitz Birkenau le 13 avril 1944 dans le convoi 71. Profitant d'une accalmie de l'épidémie de Covid-19, elle accompagne une dernière fois un groupe de collégiens. C'est le pivot du récit. Elle leur explique in situ, à Birkenau, les sept mois qu'elle y a vécu, le quotidien et les combines pour survivre. Les adolescents interloqués posent des questions. Elle répond et les flash-back s'opèrent en dessin. Ginette témoigne aussi à propos de ses camarades d'infortune, de Marceline Loridan et Simone Jacob qui prendra plus tard le nom de son mari, Veil.
Sa joie de vivre, sa générosité et son humour irrésistible sont merveilleusement traduits dans cet album. Ginette Kolinka est aujourd'hui témoin et passeuse de mémoire à la Shoah. Au collège Beaumarchais où elle fut élève, on peut lire sur la plaque commémorative à la date du 3 mars 2021 « Maintenant c'est vous ma mémoire ». Cette bande dessinée devrait figurer dans toutes les bibliothèques, écoles et être lue par toutes les jeunes générations. Le dossier Ginette Kolinka, itinéraire d'une survivante a été rédigé par Tal Bruttmann.
Album cartonné. Format : 24 x 32 cm. 112 p. 21,90€. Paule Martigny – Mémoire des Arts