La Route / Éditions Dargaud
Ce n'était certainement pas facile d'adapter ce roman survivaliste de Cormac McCarthy, prix Pulitzer Fiction 2007 et best-seller mondial. Manu Larcenet signe une nouvelle série sombre après ses adaptations remarquables de Blast et Le Rapport de Brodeck. Il a fait le choix du noir et blanc et du duotone pour ce récit post-apocalyptique en bande dessinée. On admire la cohérence graphique de début et de fin entre la première et la dernière planche. La boucle est bouclée. Cet album est un chef-d'œuvre du genre.
Un énorme nuage de cendre se répand sur le sol américain. Parmi les survivants, sous un abri de fortune, un père et son fils sont allongés. Le père se lève et prend ses jumelles. Tout est dévasté, la nature est calcinée et les villes en ruine. Aucun vivant, humain ou animal. Il faut prendre la route. Le père et le fils marchent inlassablement poussant un caddie rempli d'objets hétéroclites, le peu qui leur reste en couvertures et nourriture, et un revolver avec une seule balle. L'hiver cruel s'abat sur eux avalant leur forces. Les corps sont meurtris et leur moral éteint. Avancer, encore et encore, en direction du sud, et surtout être vigilant. Dans ce monde couvert de cendres et de cadavres, éreintés par la pluie, la neige, le froid, et la peur au ventre, il s'agit d'éviter les hordes de sauvages cannibales. Survivront-ils à leur errance ?
Peu de dialogues. L'essentiel en peu de mots. L'âpreté volontaire du graphisme et la composition très étudiée des planches suffisent. Le dessin de Manu Larcenet sublime, recherché et caractérisé cerne la relation d'une rare puissance entre le père et son jeune fils. Ils progressent en haillons, ils ont faim et sont d'une maigreur émouvante. Dans ce monde ravagé en proie à la pire inhumanité, le jeune garçon a gardé sa fraîcheur, son empathie et une confiance illimitée en son père. Sa question primordiale : savoir qui sont les méchants et les gentils.
Relié. Couverture cartonnée. Format : 25 x 31 cm. 155 p. 28,50€. Un chef-d'œuvre de la bande dessinée.
Paule Martigny / Mémoire des Arts – blog-des-arts.com