"Mon petit Truffe, ma grande Scottie" / Denoël
Cette édition est établie et commentée par Serge Toubiana, journaliste et critique de cinéma français. Il fut directeur de la Cinémathèque française de 2003 à 2016. De quelle histoire et de quelle correspondance est-il question? Au début des années 1960 Helen Scott vit à New York, sa ville natale, et se consacre à la Nouvelle Vague et à l’œuvre de Truffaut aux Etats-Unis. Ils se rencontrent à New York en janvier 1960, lorsque le jeune cinéaste s’y rend auréolé du succès de son premier film, "Les Quatre Cents Coups". Dès qu’elle l’aperçoit débarquant de l’avion, cette attachée de presse influente au sein du French Film Office chargé de promouvoir le cinéma français à l’étranger a le coup de foudre. Leur amitié fusionnelle commence à cet instant. Elle a 46 ans, lui 28. Truffaut ne parle pas l’anglais, Scott se met au service de son "Truffaut chéri", son "Truffe-Truffe", son "petit Truffe", son "Petit François", son "beau gosse", etc. Telle une mère juive pleine de débordements, elle veille sur lui et lui écrit plusieurs lettres par semaine, lui une ou deux par mois. "Un échange intense, mais inégal", compréhensible compte tenu des tournages qui se multiplient. Entre 1960 et 1965, période où ils se sont le plus écrit, Scott vit à New York. Au gré de cette sélection de lettres inédites, on suit la genèse de "Jules et Jim", de "La Peau douce", de "Fahrenheit 451", mais aussi du livre d’entretiens mythique entre Hitchcock et Truffaut dont Helen Scott fut la cheville ouvrière. Il s’agit de l’idée folle de Truffaut : 500 questions à poser à Alfred Hitchcock. Expliquer pourquoi Hitch est un génie, alors qu’il est dénigré en Amérique. Pour ce projet Helen Scott lui est indispensable, bien qu’il doive vaincre ses réticences. La mise en œuvre va être lente. Les entretiens seront enregistrés en août 1962, dans le bungalow des studios Universal de Hitchcock et ne paraîtront qu’en 1966. Helen Scott convaincue qu’il faut toucher un public plus large que celui élitiste des Cahiers du cinéma, "Le cinéma selon Hitchcock" paraîtra en français chez Robert Laffont. Depuis, il est sans cesse réédité et traduit dans le monde entier. Dans ces échanges épistolaires pleins d’esprit, l’intime l’emporte parfois sur le professionnel. Truffaut, se confie sur ses amours et ses doutes. Mais pourquoi arrêter la correspondance en 1965 ? Parce qu’à partir de 1966 commence le tournage de Fahrenheit 451 et qu’Helen Scott s’installe à Paris pour se rapprocher de François Truffaut et de sa famille, avec l’espoir de travailler régulièrement à son côté. La correspondance se poursuit dans une moindre mesure. Elle est moins informative professionnellement car ils se voient régulièrement et se téléphonent. Helen Scott aura largement contribué à faire connaître Truffaut aux Etats-Unis. S’il est si célèbre en Amérique quarante ans après sa mort, c’est en partie grâce à elle. Disparue trois ans après lui, le 20 octobre 1987, elle est enterrée au cimetière Montmartre. La tombe de "Scottie" de "chère L.N." voisine celle de "son petit Truffe". Une correspondance d’une grande richesse d’échanges sur le cinéma, pleine d’énergie, d’affection, de pertinence et d’humour. Avec un cahier de documents et de photos privées épatant. Serge Toubiana est l’auteur de la biographie de François Truffaut (Gallimard 1996, Folio 2001, avec Antoine de Baecque) et de "L’Amie américaine", consacré à Helen Scott (Stock, 2020). Broché. Format : 15,5 x 22,5 cm. 480 p. 16 p. hors texte. 24,90€. Paule Martigny. Mémoire des Arts